Chargement en cours ...

Lagunes méditerranéennes

Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive, car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.

Qu’est-ce qu’une lagune ?

Du golfe du Lion à l’extrême sud de la Corse, les lagunes méditerranéennes représentent en France environ 85 000 hectares. Derrière Thau, Berre ou Biguglia, pour les plus vastes et les plus connues, les rivages français de la Méditerranée comptent près d’une centaine de ces étangs littoraux, inégalement répartis dans les trois régions méditerranéennes.

La région Sud abrite la plus grande superficie de lagunes avec environ 46 000 hectares. Vient ensuite la région Occitanie avec environ 36 000 ha de lagunes. La Corse compte le plus de lagunes avec plus de 70 lagunes recensées sur son littoral, pour environ 3500 hectares.

La superficie des complexes lagunaires (lagune et leurs zones humides périphériques) est estimée à environ 130 000 ha sur les 3 régions méditerranéennes françaises (source: ‘Synthèse des lagunes’, 2007).

Les lagunes côtières, étendues d’eau salée ou saumâtre connectées à la mer par un (ou plusieurs) graus, sont toutes différentes par leur étendue, leur salinité, ou leur morphologie, ainsi que leur connectivité à la mer via des « graus » permanents ou intermittents – cette communication pouvant parfois être insignifiante ou ne plus exister.

La rencontre entre les courants marins et les rivières

Ce qui réunit les lagunes méditerranéennes, dans toute leur diversité, c’est d’abord leur position singulière, au point de rencontre des bassins versants et du milieu marin, qui leur confère une importance cruciale pour la biodiversité.

Ces étangs, souvent de faible profondeur, situés le long du littoral, sont séparés de la mer par une bande de sable : le lido. Ils reçoivent de l’eau douce, principalement par les cours d’eau, et sont reliés à la mer par un chenal que l’on appelle grau.

Ce mélange d’eau douce et d’eau salée, sa variabilité au cours des saisons et des années font la richesse et la particularité des lagunes.

Chaque lagune constitue un paysage et un milieu de vie uniques, en permanente évolution.

Comprises entre terre et mer, les lagunes entretiennent tout naturellement des relations étroites avec les zones humides qui les entourent (marais, etc.) et reçoivent de nombreux apports du bassin versant.

Localement, dans le langage courant, le mot « étang » qui désigne différents types d’écosystèmes naturels ou artificiels se substitue à l’appellation « lagune ».

Typologie des lagunes

La profondeur des lagunes est généralement de l’ordre du mètre mais il existe des milieux beaucoup plus profonds, à mettre en relation avec leur origine géomorphologique :

Genèse des lagunes

La formation des lagunes méditerranéennes débute il y a bien longtemps. A la fin de la dernière glaciation il y a 10 000 ans, le climat se réchauffe, la calotte glacière fond… le niveau de la mer s’élève progressivement. Au cours de sa remontée, qui s’est stabilisée au niveau actuel il y a environ 6 000 ans, les  vagues et les courants qui transportent des sables le long du rivage construisent lentement un cordon sableux, le lido. Ce cordon sableux sépare la mer des eaux saumâtres qui ont envahi les parties les plus basses de la plaine littorale. Seuls les graus, interruptions des lidos, maintiennent une communication entre les étangs et la mer.

Selon la réglementation française, pour l’application de la police de l’eau, les lagunes et étangs saumâtres peuvent avoir un statut de « plan d’eau ». Néanmoins, au niveau des berges, les espaces colonisés par une végétation aquatique ou paludicole, comme les nénuphars ou les roseaux, peuvent être qualifier au cas par cas de zones humides. Les parties profondes et peu végétalisées des plans d’eau ne sont pas des « zones humides ».

D’après la convention de Ramsar, les lagunes et les étangs saumâtres sont considérés comme  des « zones humides littorales ». Sources : www.pole-lagunes.org, www.zones-humides.org, www.conservatoire-du-littoral.fr

©Philippe LAMBRET

Les espèces associées

Le taux de salinité y est variable : faible, voire nul en début de saison lorsque les eaux de pluie ont gonflé les niveaux d’eau, il augmente en cours de saison au fur et à mesure que le milieu s’assèche. Il arrive d’ailleurs fréquemment que les bassins s’assèchent totalement au cours de l’été. Ces lagunes sont caractérisées par de vastes massifs de Scirpe maritime (Bulboschoenus maritimus) qui les colonisent. Le cortège qui exploite ces zones humides particulières sont dominés par des espèces adaptées aux milieux temporaires. C’est le cas des lestes comme L. dryas, L. barbarus, L. virens ou le méditerranéen Lestes macrostigma dont les œufs sont pondus à l’intérieur des tiges de scirpe et sont ainsi protégés durant la saison sèche. Ces larves qui tombent à l’eau au cours de l’hiver, se développent rapidement permettant une émergence précoce, avant que le taux de salinité ne devienne létal. Cette adaptation à une période courte de mise en eau du milieu leur permet d’éviter une trop forte concurrence car bon nombre d’espèces ne supportent pas de telles conditions. Les sympétrums tels que S. meridionale, S. striolatum et S. fonscolombii qui apprécient aussi les fluctuations de niveau d’eau et pondent régulièrement sur les parties exondées, sont également bien représentés dans ces milieux saumâtres. Si le taux de salinité reste modéré, d’autres espèces peuvent accompagner lestes et sympétrums. Aeshna affinis, Ischnura pumilio, Ischnura elegans, Sympecma fusca peuvent même présenter des densités de peuplement remarquables.

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr, Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature).

Eaux stagnantes

Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.

Les sources et suintements

Les sources et suintements apparaissent au niveau de résurgences d’eau souterraines et sont à l’origine des petits ruisseaux. Une « source » est un point d’émergence, à la surface du sol, de l’eau provenant des nappes aquifères. On parle plutôt de « suintement » lorsque l’écoulement de cette eau est diffus. En règle générale, les suintements issus de nappes souterraines, perchées ou non, entretiennent de façon pérenne un caractère marécageux à la zone dans laquelle ils se trouvent. On peut les trouver aussi bien sur sols acides que sur des terrains calcaires. Les suintements constituent des habitats de développement larvaire attractifs pour certaines espèces de libellules qui sont adaptées au réchauffement rapide de leurs eaux.

Ces milieux sont très localisés et occupent des surfaces très restreintes, souvent en mosaïque avec d’autres milieux, notamment les bas-marais et tourbières. Ils peuvent alimenter des mares, de petites zones de marais ou des landes humides. C’est pourquoi il est parfois difficile de les distinguer.

Ce sont des lieux privilégiés pour des espèces végétales comme le cresson, mais aussi les mousses et les algues, qui servent d’abri à de nombreux invertébrés : crustacés, gastéropodes, larves d’insectes…

Sources : zones-humides.org

Les milieux temporaires

Par définition, il s’agit de pièces d’eau saisonnières qui s’assèchent en cours d’été. La plupart du temps, l’eau est collectée naturellement lors des fortes pluies d’hiver et de printemps par le ruissellement ou par les crues des cours d’eau. On peut classer dans cette catégorie plusieurs types de milieux. Mais le fait qu’ils ne soient pas pérennes et qu’il faut en conséquence aux espèces qui les colonisent des stratégies de ponte et un développement larvaire adaptés, pousse cependant à les traiter ensemble. Toute flaque peut être considérée comme milieu temporaire. Dans les zones très boisées, les ornières disséminées sur les chemins forestiers peuvent constituer un habitat pour des espèces très spécialisées (des lestes notamment). Les tronçons aval des fleuves et grandes rivières, soumis à des crues qui laissent, si la topographie le permet, des zones humides temporaires qui attirent selon les années de très nombreuses libellules. Les zones d’expansion des crues des grands cours d’eau sont des dépressions inondables qui présentent une grande richesse odonatologique et parfois des densités de peuplement conséquentes (Jourde, 2004).

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Les mares

Les mares sont des milieux stagnants ayant une superficie inférieure à 1000 m2. Ces petites zones humides continentales sont souvent de vrais îlots de biodiversité et abritent généralement un peuplement odonatologique riche et varié sur de petites surfaces. De nombreux paramètres font varier la composition des peuplements de libellules. L’ensoleillement est l’un des principaux. En effet, la majorité des mares sont peu profondes et le rayonnement solaire pénètre souvent jusqu’au fond et permet à l’eau de vite se réchauffer. En conséquence, ces pièces d’eau ensoleillées, que l’on trouve le plus souvent en milieu prairial, possèdent une végétation aquatique riche et souvent dense. De nombreux hydrophytes les colonisent et elles sont souvent ceintes d’une large bande d’hélophytes composée de cypéracées et joncacées. Cette végétation sert d’abri et de terrain de chasse aux larves, de support de ponte puis d’émergence à de très nombreuses espèces de libellules. Ces mares en milieu ouvert, hébergent des cortèges souvent dominés par Libellula depressa, L. quadrimaculata et Anax imperator, puis en fin de saison, par Aeshna cyanea. D’autres anisoptères sont parfois présents, notamment Bachytron pratense, Cordulia aenea à la fin du printemps, Crocothemis erythraea, Sympetrum sanguineum, S. striolatum et ponctuellement Aeshna affinis en été. Les espèces de zygoptères complètent les cortèges et les effectifs sont fréquemment importants relativement à l’étroitesse de l’habitat. Les agrions sont massivement présents au printemps : Coenagrion scitulum, C. puella. A partir d’août, au moment où beaucoup de mares commencent à s’assécher, c’est au tour des lestes, espèces adaptées aux milieux temporaires ou régulièrement exondés, d’occuper la pièce d’eau. Lestes dryas, L. sponsa, L. virens trouvent alors, au milieu des touffes de joncs, de carex, parfois d’iris, les conditions propices à leur accouplement puis à la ponte. Pour ces espèces, l’éclosion des œufs et le développement des larves se feront rapidement au printemps suivant lorsque les mares auront retrouvé un niveau d’eau suffisant. Beaucoup d’autres espèces aux exigences moins fortes peuvent être observées sur ces mares de prairies. A contrario, les mares forestières très fermées et pauvres en végétation aquatique, dont le fond est souvent recouvert d’une épaisse couche de feuilles mortes, abritent une faible diversité odonatologique. L’espèce la plus courante est Aeshna cyanea dont l’écologie est très plastique. Pyrrhosoma nymphula, Sympecma fusca et Coenagrion tenellum sont aussi régulièrement observés dans ces mares à condition que le soleil arrive de temps à autre à traverser le couvert arboré.

Les mares sont parfois très aménagées par l’homme. Localisées au sein des fermes, elles peuvent abriter canards domestiques et poissons, être plus ou moins dépourvues de végétation et avoir une eau à la qualité douteuse. La diversité odonatologique est évidemment faible. On y rencontre Libellula depressa, Orthetrum cancellatum et quelques espèces ubiquistes peu exigeantes comme Ishnura elegans. Quant aux mares d’agréments et de jardin, si l’entretien est léger, elles peuvent servir de milieu de développement pour plusieurs espèces. En quelques années, on peut facilement compter une quinzaine d’espèces, certes souvent parmi les plus communes et répandues, mais qui trouvent dans ces bassins de jardins des milieux de substitution opportuns. 

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Les étangs

Ces milieux stagnants de grande superficie sont les zones humides qui abritent la plupart du temps la plus grande diversité odonatologique. Cependant, il serait un peu simpliste de parler d’un seul cortège odonatologique lié à ce type de milieu. Cette richesse spécifique découle en effet de la variété des habitats distincts présents dans et autour de l’étang. Les habitats annexes sont souvent nombreux et chacun d’entre eux abrite un cortège particulier. Sources, ruisseaux ou fossés d’alimentation, zone d’assèchement en queue d’étang, zone de marnage, roselières, partie inondée temporairement, émissaires, etc. peuvent offrir des conditions favorables aux exigences écologiques d’un grand nombre de taxons. En règle générale, les étangs les plus riches sont ceux qui sont bien ensoleillés, qui disposent d’une eau mésotrophe à eutrophe, dans laquelle la végétation aquatique et rivulaire est riche et variée (potamots, nénuphars, joncs, laîche, roseaux, saules, etc.). Cette richesse est également favorisée par le regroupement et la proximité géographique d’un grand nombre d’étangs. Le cortège lié au milieu principal de ce type de zone humide est généralement centré sur Bachytron pratense, Anax imperator, Coenagrion puella, Crocothemis erythraea, Ischnura elegans, Libellula quadrimaculata, Orthetrum cancellatum, Platycnemis pennipes, Pyrrhosoma nymphula, Sympetrum sanguineum, Sympetrum striolatum, Libellula depressa. Sur les étangs les plus riches et en fonction des conditions, la liste peut vite s’enrichir : Coenagrion pulchellum, Enallagma cyathigerum, E. najas, E. viridulum, Gomphus pulchellus, Ischnura pumilio, Lestes barbarus, Orthetrum albistylum et Sympecma fusca.

Etang des Auguillères – Uzeste (33) © Gilles BAILLEUX

Plusieurs facteurs limitants peuvent entraîner la diminution du nombre d’espèces figurant dans les cortèges des étangs. Tout d’abord lorsque les eaux sont très acides, ce qui est peu courant dans la région, les cortèges sont moins diversifiés mais certaines espèces renforcent alors leur présence : Ceriagrion tenellum et les cordulies comme Cordulia aenea ou Somatochlora flavomaculata. Enfin, l’odonatofaune peut être nettement plus pauvre lorsque les étangs sont insérés dans un vaste environnement forestier. Toutefois, là encore, certaines espèces se montrent mieux adaptées que d’autres à ce type de biotope : Sympecma fusca, Ceriagrion tenellum, Aeshna cyanea, Somatochlora metallica.

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Les étangs et les mares aux eaux oligotrophes

Il s’agit de milieux caractérisés par des eaux acides ou alcalines pauvres en éléments nutritifs. Ces plans d’eau de tailles très diverses, étangs, mares, petites dépressions, peuvent parfois être insérés dans d’anciennes zones de marais plus ou moins tourbeux. Ces milieux, qui sont de plus en plus rares accueillent une faune odonatologique parfois exceptionnelle comme le sont les trois espèces emblématiques de leucorrhines : Leucorrhinia pectoralis, L. caudalis et L. albifrons. On trouve encore ces habitats sur des étangs localisés en tête de bassins et à l’abri des pollutions ou sur d’anciennes zones d’extraction de matériaux (pierre meulière, marne, argile …). Sur ces milieux, le cortège odonatologique est riche et diversifié avec parfois plus de 40 espèces dont les plus caractéristiques sont : Libellula quadrimaculata, Somatochlora flavomaculata, Cordulia aenea, Coenagrion tenellum, Coenagrion scitulum, Enallagma cyathigerum. Ces espèces supportent une certaine acidité de l’eau et s’accommodent plus que d’autres de la pauvreté relative du milieu.

Etang de la Brenne – Indre (36) © Eric SANSAULT

Dans certaines conditions, ponctuellement, ces zones humides peuvent aussi se révéler favorables au développement d’espèces moins exigeantes, que l’on peut qualifier d’espèces secondaires, qui s’y succèdent en fonction de leur phénologie. Il s’agit notamment de Pyrrhosoma nymphula, Coenagrion puella, Anax imperator, Lestes viridis, L. sponsa, L. barbarus, Aeshna affinis, A. isoceles, Brachytron pratense, Gomphus pulchellus, Crocothemis erythraea, Libellula depressa, Sympetrum sanguineum, Sympetrum striolatum, Sympecma fusca et, uniquement sur des étangs, la rare Epitheca bimaculata.

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Les milieux artificiels : sablières, gravières

Ces zones artificielles sont très souvent d’anciennes zones d’extraction de matériaux alluvionnaires, que l’on nomme sablières ou ballastières, mais peuvent aussi, localement, concerner d’autres roches comme l’argile. Après exploitation, ces carrières sont réaménagées et souvent mises en eau créant ainsi de nouvelles zones humides. Dans un premier temps des cortèges pionniers colonisent ces milieux neufs. Ischnura pumilio, Crocothemis erythraea, Anax imperator, Orthetrum cancellatum, Libellula depressa et parfois Lestes barbarus sont les premières à apparaître. Ces espèces acceptent la rareté, voire l’absence de plantes aquatiques caractéristiques des premières années d’existence de ces plans d’eau. Si le niveau d’eau est variable, les zones peu profondes régulièrement exondées permettent aux Sympetrum fonscolombii de déposer leur ponte sur le substrat émergé puis à leurs larves de se développer dans des eaux rapidement réchauffées. Les larves d’Orthetrum albistylum et surtout de Gomphus pulchellus peuvent aussi profiter des berges en pente douce dépourvues de végétation où l’eau monte vite en température.

Dès que la ceinture de végétation et les herbiers aquatiques se développent, certaines espèces pionnières disparaissent et les cortèges s’enrichissent à l’image de ceux que l’on rencontre sur des étangs plus anciens et plus « naturels ». On trouvera couramment Lestes viridis, Coenagrion puella, Ischnura. elegans, Orthetrum brunneum, O. coerulescens, O. cancellatum, Platycnemis pennipes, P. acutipennis, Sympetrum sanguineum, S. striolatum, Libellula quadrimaculata, Enallagma viridulum. Lorsque ces sablières ou gravières sont proches de cours d’eau, on peut y rencontrer des espèces d’eaux courantes : Macromia splendensOxygastra curtisii par exemple.

Malheureusement, il arrive fréquemment que la nouvelle exploitation qui est faite de ces milieux, souvent à des fins récréatives, ne permette pas à une faune odonatologique riche de s’installer. En effet, la multiplication des interventions de l’homme et l’artificialisation, entraîne l’appauvrissement général du milieu.
En outre, ces sablières lorsqu’elles sont à vocation halieutique, hébergent très souvent des espèces animales prédatrices en grande densité comme la Perche soleil (Lepomis gibbosus), le Black-bass (Micropterus salmoides), diverses espèces d’écrevisses allochtones ou bien des poissons fouisseurs comme les carpes (Cyprinus carpio). La présence de ces espèces, qui sont parfois invasives, est incompatible avec l’installation de cortèges de libellules riches et variés.

Occasionnellement, avec le temps et si la « remise en nature » du site a été réalisée correctement, les anciennes gravières, sablières ou argilières peuvent s’avérer des zones humides remarquables accueillant une odonatofaune riche et variée. 

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Les canaux et fossés des marais

Les marais arrière-littoraux sont drainés par des canaux au courant très faible, parfois nul. C’est le cas, par exemple, du Marais poitevin qui s’étend sur plus de 20 000 hectares dans la région Poitou-Charentes. La grande majorité du temps les eaux de ces canaux sont fortement eutrophisées. Le peuplement odonatologique y est limité même si certains secteurs peuvent revêtir un intérêt non négligeable. Les libellules les plus fréquentes sont celles qui sont adaptées à ces conditions, qui supportent des eaux chaudes, envahies par la végétation, pauvres en oxygène dissous. On trouve évidemment des espèces eurytopes aux exigences faibles en termes de qualité du milieu : Anax imperator, Crocothemis erythraea, Ischnura elegans, Orthetrum cancellatum, Libellula depressa, Sympetrum sanguineum, S. striolatum, Platycnemis pennipes sont omniprésents et souvent accompagnés de libellules à l’écologie moins plastique mais qui trouvent dans ces conditions particulières les éléments favorables à leur développement, richesse de la végétation flottante et chaleur de l’eau notamment. C’est le cas d’Enallagma viridulum, Platycnemis latipes, P. acutipennis, Aeshna isoceles. Dans ces marais arrière-littoraux, certaines zones de dépressions sont inondées en hiver puis se retrouvent isolées et déconnectées du réseau des canaux. Elles constituent alors des zones humides temporaires tout à fait originales qui sont exploitées par des espèces caractéristiques des milieux temporaires, lestes, sympétrums et Ischnura pumilio, quelquefois par Ischnura elegans, Aeshna affinis, Libellula depressa et Orthetrum cancellatum.

Dans le sud de la France, les canaux d’irrigation abrite des populations de Coenagrion caerulescens et de Coenagrion mercuriale.

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)

Tourbières

Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive, car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.

Définition

Une tourbière est un milieu caractérisé par la présence, ou la formation, d’un sol composé de tourbe, soit de la matière organique très peu décomposée.

Pour que la tourbe se forme, des conditions écologiques particulières doivent être présentes, notamment :

Dans ces conditions saturées, anoxiques (sans oxygène), la végétation produite ne se décompose que très lentement et très partiellement.

D’autres facteurs peuvent également favoriser le ralentissement de la décomposition : par exemple, la basse température, et le pH bas (acidité), et certaines espèces de plantes qui se décomposent plus lentement que d’autres.

Si ces conditions sont maintenues dans le temps, cette tourbe peut s’accumuler progressivement pendant des siècles, voire des millénaires.

Une note sur la terminologie :

Parfois, le terme « tourbière » est réservé aux milieux ayant une épaisseur minimum de tourbe (10, 40, voire 50 cm en fonction de l’auteur) ou une teneur minimum en matière organique (typiquement de 20% ou 30%). Les milieux contenant des dépôts de tourbe ou de sol organique ne remplissant pas ces critères sont parfois appelés des milieux paratourbeux, semitourbeux ou pseudotourbeux.

Les différents types de tourbières

Il existe des plusieurs classifications permettant d’identifier et de décrire les tourbières en fonction de leurs diverses caractéristiques.

On peut distinguer les tourbières en fonction de, par exemple :

Leur acidité (pH) :

Leur niveau trophique (teneur en éléments nutritifs, notamment azote et phosphore) :

Leur alimentation hydrique actuelle :

Leur alimentation hydrique initiale et les processus à l’origine de la tourbière :

Leur végétation dominante, par exemple les tourbières à sphaignes, à grandes ou à petites laîches, à roseaux…

Leur morphologie, par exemple les tourbières plates et les tourbières bombées.

Leur situation géomorphologique, par exemple les tourbières de fond de vallon, de pente, de surcreusement glaciaire…

Leur contexte climatique et biogéographique, par exemple les tourbières boréalesatlantiquescontinentalesméditerranéennestropicales

Leur état de conservation, notamment en lien avec leur historique d’utilisation par l’homme (pâturage, sylviculture, exploitation de tourbe…)

Dans la réalité du terrain, il est important de prendre toutes ces considérations en compte dans la caractérisation d’une tourbière, et une seule typologie ne suffit que rarement pour bien décrire un site. Des hybrides, des formes intermédiaires entre deux ou plusieurs catégories, et des particularités locales nous obligent à caractériser chaque site de façon plus ou moins unique.

Sources : www.pole-tourbieres.org


Les libellules qui colonisent ces milieux sont celles qui apprécient les eaux acides et qui acceptent la pauvreté en nutriments qui les caractérise. Coenagrion tenellum et Pyrrhosoma nymphula sont les zygoptères les plus fréquents mais on trouve aussi Coenagrion scitulum ou Coenagrion hastulatum. Les anisoptères typiques sont Libellula quadrimaculata, Orthetrum coerulescens, Cordulia aenea, Sympetrum danae et Somatochlora flavomaculata.  Certaines espèces y sont même strictement inféodées, telles que Somatochlora alpestris, Leucorrhinia dubia et Aeshna subarctica.

Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Aborder la gestion conservatoire en faveur des Odonates – Guide technique – 2016

Ruisseaux et petites rivières

Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive, car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.

Deux types de milieux naturels sont associés à ces habitats : les têtes de bassins versants et certaines annexes hydrauliques liées au fonctionnement des nappes alluviales associées aux fleuves et rivières. Il est important de signaler que la réalisation de fossés de drainage ou de canaux d’irrigations dans les vallées alluviales a permis la création de nombreux habitats de substitution où se sont installées certaines espèces.

Parmi eux, on peut distinguer les sources et suintements des têtes de bassins, caractérisés par des eaux fraîches, souvent faiblement courantes, pauvres en nutriments et en matières organiques (sauf en cas de perturbation locale) et bien oxygénées. En zone méditerranéenne, on peut notamment retrouver dans ces milieux Coenagrion caerulescens. D’autres agrions (C. mercuriale et C. ornatum par exemple), se développent directement en aval des têtes de bassins, dans les petits cours d’eau bien ensoleillés et riches en végétation aquatique.

Grandes rivières et fleuves

Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive, car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.

Les espèces liées à ces grands types de milieux sont associées à la dynamique de l’hydrosystème fluvial. Cependant, certaines espèces sont liées à des cours lents et certains aménagements comme des retenues génèrent des micro-habitats larvaires favorables.

La Gartempe et sa végétation caractéristique (Ranunculion fluitantis)
Indre-et-loire © Eric SANSAULT

Les méandres des fleuves ou des rivières créent des zones plus calmes et plus profondes où le courant
est ralenti et où les dépôts de sédiments et les embâcles facilitent l’accumulation de débris végétaux,
offrant ainsi des habitats favorables au développement de certains Odonates. Les espèces liées à ces
grands types de milieux sont associées à la dynamique de l’hydrosystème fluvial. C’est notamment le
cas de certains gomphes (Stylurus flavipes ou Ophiogomphus cecilia) dont les larves vivent plus ou
moins enfouies sur les bancs de sédiments. Certaines espèces, telles que Oxygastra curtisii et Gomphus graslinii sont liées à des cours d’eau plus lents. La première utilise les chevelus racinaires des arbres rivulaires comme habitat larvaire. La seconde peut être favorisée par les zones sableuses, si possible recouvertes de débris végétaux qui génèrent des microhabitats larvaires propices. En domaine méditerranéen, les cours d’eau ont un régime de crues et d’étiage particulièrement marqué, ce qui a
un caractère limitant sur les peuplements. Malgré tout, on retrouve Macromia splendens sur plusieurs stations.