Les 33 espèces ciblées par ce Plan national d’actions occupent des habitats qu’il est difficile de décrire de manière exhaustive car les odonates ont des exigences fines dépendant à la fois de leurs habitats larvaires et des milieux environnants.
Les sources et suintements apparaissent au niveau de résurgences d’eau souterraines et sont à l’origine des petits ruisseaux. Une « source » est un point d’émergence, à la surface du sol, de l’eau provenant des nappes aquifères. On parle plutôt de « suintement » lorsque l’écoulement de cette eau est diffus. En règle générale, les suintements issus de nappes souterraines, perchées ou non, entretiennent de façon pérenne un caractère marécageux à la zone dans laquelle ils se trouvent. On peut les trouver aussi bien sur sols acides que sur des terrains calcaires. Les suintements constituent des habitats de développement larvaire attractifs pour certaines espèces de libellules qui sont adaptées au réchauffement rapide de leurs eaux.
Ces milieux sont très localisés et occupent des surfaces très restreintes, souvent en mosaïque avec d’autres milieux, notamment les bas-marais et tourbières. Ils peuvent alimenter des mares, de petites zones de marais ou des landes humides. C’est pourquoi il est parfois difficile de les distinguer.
Ce sont des lieux privilégiés pour des espèces végétales comme le cresson, mais aussi les mousses et les algues, qui servent d’abri à de nombreux invertébrés : crustacés, gastéropodes, larves d’insectes…
Sources : zones-humides.org
Par définition, il s’agit de pièces d’eau saisonnières qui s’assèchent en cours d’été. La plupart du temps, l’eau est collectée naturellement lors des fortes pluies d’hiver et de printemps par le ruissellement ou par les crues des cours d’eau. On peut classer dans cette catégorie plusieurs types de milieux. Mais le fait qu’ils ne soient pas pérennes et qu’il faut en conséquence aux espèces qui les colonisent des stratégies de ponte et un développement larvaire adaptés, pousse cependant à les traiter ensemble. Toute flaque peut être considérée comme milieu temporaire. Dans les zones très boisées, les ornières disséminées sur les chemins forestiers peuvent constituer un habitat pour des espèces très spécialisées (des lestes notamment). Les tronçons aval des fleuves et grandes rivières, soumis à des crues qui laissent, si la topographie le permet, des zones humides temporaires qui attirent selon les années de très nombreuses libellules. Les zones d’expansion des crues des grands cours d’eau sont des dépressions inondables qui présentent une grande richesse odonatologique et parfois des densités de peuplement conséquentes (Jourde, 2004).
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)
Les mares sont des milieux stagnants ayant une superficie inférieure à 1000 m2. Ces petites zones humides continentales sont souvent de vrais îlots de biodiversité et abritent généralement un peuplement odonatologique riche et varié sur de petites surfaces. De nombreux paramètres font varier la composition des peuplements de libellules. L’ensoleillement est l’un des principaux. En effet, la majorité des mares sont peu profondes et le rayonnement solaire pénètre souvent jusqu’au fond et permet à l’eau de vite se réchauffer. En conséquence, ces pièces d’eau ensoleillées, que l’on trouve le plus souvent en milieu prairial, possèdent une végétation aquatique riche et souvent dense. De nombreux hydrophytes les colonisent et elles sont souvent ceintes d’une large bande d’hélophytes composée de cypéracées et joncacées. Cette végétation sert d’abri et de terrain de chasse aux larves, de support de ponte puis d’émergence à de très nombreuses espèces de libellules. Ces mares en milieu ouvert, hébergent des cortèges souvent dominés par Libellula depressa, L. quadrimaculata et Anax imperator, puis en fin de saison, par Aeshna cyanea. D’autres anisoptères sont parfois présents, notamment Bachytron pratense, Cordulia aenea à la fin du printemps, Crocothemis erythraea, Sympetrum sanguineum, S. striolatum et ponctuellement Aeshna affinis en été. Les espèces de zygoptères complètent les cortèges et les effectifs sont fréquemment importants relativement à l’étroitesse de l’habitat. Les agrions sont massivement présents au printemps : Coenagrion scitulum, C. puella. A partir d’août, au moment où beaucoup de mares commencent à s’assécher, c’est au tour des lestes, espèces adaptées aux milieux temporaires ou régulièrement exondés, d’occuper la pièce d’eau. Lestes dryas, L. sponsa, L. virens trouvent alors, au milieu des touffes de joncs, de carex, parfois d’iris, les conditions propices à leur accouplement puis à la ponte. Pour ces espèces, l’éclosion des œufs et le développement des larves se feront rapidement au printemps suivant lorsque les mares auront retrouvé un niveau d’eau suffisant. Beaucoup d’autres espèces aux exigences moins fortes peuvent être observées sur ces mares de prairies. A contrario, les mares forestières très fermées et pauvres en végétation aquatique, dont le fond est souvent recouvert d’une épaisse couche de feuilles mortes, abritent une faible diversité odonatologique. L’espèce la plus courante est Aeshna cyanea dont l’écologie est très plastique. Pyrrhosoma nymphula, Sympecma fusca et Coenagrion tenellum sont aussi régulièrement observés dans ces mares à condition que le soleil arrive de temps à autre à traverser le couvert arboré.
Les mares sont parfois très aménagées par l’homme. Localisées au sein des fermes, elles peuvent abriter canards domestiques et poissons, être plus ou moins dépourvues de végétation et avoir une eau à la qualité douteuse. La diversité odonatologique est évidemment faible. On y rencontre Libellula depressa, Orthetrum cancellatum et quelques espèces ubiquistes peu exigeantes comme Ishnura elegans. Quant aux mares d’agréments et de jardin, si l’entretien est léger, elles peuvent servir de milieu de développement pour plusieurs espèces. En quelques années, on peut facilement compter une quinzaine d’espèces, certes souvent parmi les plus communes et répandues, mais qui trouvent dans ces bassins de jardins des milieux de substitution opportuns.
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)
Ces milieux stagnants de grande superficie sont les zones humides qui abritent la plupart du temps la plus grande diversité odonatologique. Cependant, il serait un peu simpliste de parler d’un seul cortège odonatologique lié à ce type de milieu. Cette richesse spécifique découle en effet de la variété des habitats distincts présents dans et autour de l’étang. Les habitats annexes sont souvent nombreux et chacun d’entre eux abrite un cortège particulier. Sources, ruisseaux ou fossés d’alimentation, zone d’assèchement en queue d’étang, zone de marnage, roselières, partie inondée temporairement, émissaires, etc. peuvent offrir des conditions favorables aux exigences écologiques d’un grand nombre de taxons. En règle générale, les étangs les plus riches sont ceux qui sont bien ensoleillés, qui disposent d’une eau mésotrophe à eutrophe, dans laquelle la végétation aquatique et rivulaire est riche et variée (potamots, nénuphars, joncs, laîche, roseaux, saules, etc.). Cette richesse est également favorisée par le regroupement et la proximité géographique d’un grand nombre d’étangs. Le cortège lié au milieu principal de ce type de zone humide est généralement centré sur Bachytron pratense, Anax imperator, Coenagrion puella, Crocothemis erythraea, Ischnura elegans, Libellula quadrimaculata, Orthetrum cancellatum, Platycnemis pennipes, Pyrrhosoma nymphula, Sympetrum sanguineum, Sympetrum striolatum, Libellula depressa. Sur les étangs les plus riches et en fonction des conditions, la liste peut vite s’enrichir : Coenagrion pulchellum, Enallagma cyathigerum, E. najas, E. viridulum, Gomphus pulchellus, Ischnura pumilio, Lestes barbarus, Orthetrum albistylum et Sympecma fusca.
Plusieurs facteurs limitants peuvent entraîner la diminution du nombre d’espèces figurant dans les cortèges des étangs. Tout d’abord lorsque les eaux sont très acides, ce qui est peu courant dans la région, les cortèges sont moins diversifiés mais certaines espèces renforcent alors leur présence : Ceriagrion tenellum et les cordulies comme Cordulia aenea ou Somatochlora flavomaculata. Enfin, l’odonatofaune peut être nettement plus pauvre lorsque les étangs sont insérés dans un vaste environnement forestier. Toutefois, là encore, certaines espèces se montrent mieux adaptées que d’autres à ce type de biotope : Sympecma fusca, Ceriagrion tenellum, Aeshna cyanea, Somatochlora metallica.
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)
Il s’agit de milieux caractérisés par des eaux acides ou alcalines pauvres en éléments nutritifs. Ces plans d’eau de tailles très diverses, étangs, mares, petites dépressions, peuvent parfois être insérés dans d’anciennes zones de marais plus ou moins tourbeux. Ces milieux, qui sont de plus en plus rares accueillent une faune odonatologique parfois exceptionnelle comme le sont les trois espèces emblématiques de leucorrhines : Leucorrhinia pectoralis, L. caudalis et L. albifrons. On trouve encore ces habitats sur des étangs localisés en tête de bassins et à l’abri des pollutions ou sur d’anciennes zones d’extraction de matériaux (pierre meulière, marne, argile …). Sur ces milieux, le cortège odonatologique est riche et diversifié avec parfois plus de 40 espèces dont les plus caractéristiques sont : Libellula quadrimaculata, Somatochlora flavomaculata, Cordulia aenea, Coenagrion tenellum, Coenagrion scitulum, Enallagma cyathigerum. Ces espèces supportent une certaine acidité de l’eau et s’accommodent plus que d’autres de la pauvreté relative du milieu.
Dans certaines conditions, ponctuellement, ces zones humides peuvent aussi se révéler favorables au développement d’espèces moins exigeantes, que l’on peut qualifier d’espèces secondaires, qui s’y succèdent en fonction de leur phénologie. Il s’agit notamment de Pyrrhosoma nymphula, Coenagrion puella, Anax imperator, Lestes viridis, L. sponsa, L. barbarus, Aeshna affinis, A. isoceles, Brachytron pratense, Gomphus pulchellus, Crocothemis erythraea, Libellula depressa, Sympetrum sanguineum, Sympetrum striolatum, Sympecma fusca et, uniquement sur des étangs, la rare Epitheca bimaculata.
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)
Ces zones artificielles sont très souvent d’anciennes zones d’extraction de matériaux alluvionnaires, que l’on nomme sablières ou ballastières, mais peuvent aussi, localement, concerner d’autres roches comme l’argile. Après exploitation, ces carrières sont réaménagées et souvent mises en eau créant ainsi de nouvelles zones humides. Dans un premier temps des cortèges pionniers colonisent ces milieux neufs. Ischnura pumilio, Crocothemis erythraea, Anax imperator, Orthetrum cancellatum, Libellula depressa et parfois Lestes barbarus sont les premières à apparaître. Ces espèces acceptent la rareté, voire l’absence de plantes aquatiques caractéristiques des premières années d’existence de ces plans d’eau. Si le niveau d’eau est variable, les zones peu profondes régulièrement exondées permettent aux Sympetrum fonscolombii de déposer leur ponte sur le substrat émergé puis à leurs larves de se développer dans des eaux rapidement réchauffées. Les larves d’Orthetrum albistylum et surtout de Gomphus pulchellus peuvent aussi profiter des berges en pente douce dépourvues de végétation où l’eau monte vite en température.
Dès que la ceinture de végétation et les herbiers aquatiques se développent, certaines espèces pionnières disparaissent et les cortèges s’enrichissent à l’image de ceux que l’on rencontre sur des étangs plus anciens et plus « naturels ». On trouvera couramment Lestes viridis, Coenagrion puella, Ischnura. elegans, Orthetrum brunneum, O. coerulescens, O. cancellatum, Platycnemis pennipes, P. acutipennis, Sympetrum sanguineum, S. striolatum, Libellula quadrimaculata, Enallagma viridulum. Lorsque ces sablières ou gravières sont proches de cours d’eau, on peut y rencontrer des espèces d’eaux courantes : Macromia splendens, Oxygastra curtisii par exemple.
Malheureusement, il arrive fréquemment que la nouvelle exploitation qui est faite de ces milieux, souvent à des fins récréatives, ne permette pas à une faune odonatologique riche de s’installer. En effet, la multiplication des interventions de l’homme et l’artificialisation, entraîne l’appauvrissement général du milieu.
En outre, ces sablières lorsqu’elles sont à vocation halieutique, hébergent très souvent des espèces animales prédatrices en grande densité comme la Perche soleil (Lepomis gibbosus), le Black-bass (Micropterus salmoides), diverses espèces d’écrevisses allochtones ou bien des poissons fouisseurs comme les carpes (Cyprinus carpio). La présence de ces espèces, qui sont parfois invasives, est incompatible avec l’installation de cortèges de libellules riches et variés.
Occasionnellement, avec le temps et si la « remise en nature » du site a été réalisée correctement, les anciennes gravières, sablières ou argilières peuvent s’avérer des zones humides remarquables accueillant une odonatofaune riche et variée.
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)
Les marais arrière-littoraux sont drainés par des canaux au courant très faible, parfois nul. C’est le cas, par exemple, du Marais poitevin qui s’étend sur plus de 20 000 hectares dans la région Poitou-Charentes. La grande majorité du temps les eaux de ces canaux sont fortement eutrophisées. Le peuplement odonatologique y est limité même si certains secteurs peuvent revêtir un intérêt non négligeable. Les libellules les plus fréquentes sont celles qui sont adaptées à ces conditions, qui supportent des eaux chaudes, envahies par la végétation, pauvres en oxygène dissous. On trouve évidemment des espèces eurytopes aux exigences faibles en termes de qualité du milieu : Anax imperator, Crocothemis erythraea, Ischnura elegans, Orthetrum cancellatum, Libellula depressa, Sympetrum sanguineum, S. striolatum, Platycnemis pennipes sont omniprésents et souvent accompagnés de libellules à l’écologie moins plastique mais qui trouvent dans ces conditions particulières les éléments favorables à leur développement, richesse de la végétation flottante et chaleur de l’eau notamment. C’est le cas d’Enallagma viridulum, Platycnemis latipes, P. acutipennis, Aeshna isoceles. Dans ces marais arrière-littoraux, certaines zones de dépressions sont inondées en hiver puis se retrouvent isolées et déconnectées du réseau des canaux. Elles constituent alors des zones humides temporaires tout à fait originales qui sont exploitées par des espèces caractéristiques des milieux temporaires, lestes, sympétrums et Ischnura pumilio, quelquefois par Ischnura elegans, Aeshna affinis, Libellula depressa et Orthetrum cancellatum.
Dans le sud de la France, les canaux d'irrigation abrite des populations de Coenagrion caerulescens et de Coenagrion mercuriale.
Sources : www.poitou-charentes-nature.asso.fr Eric PRUD’HOMME et Laurent PRÉCIGOUT (Charente Nature) et Miguel GAILLEDRAT (Vienne nature)